Certains gérants européens se spécialisent pour créer de la valeur dans un contexte de levées de fonds délicat.
JC Flowers, AnaCap Financial, Lightyear Capital, GMT Communications, Silver Lake, Francisco Pamiers, Hitec Vision Resource Capital, Lion Capital, etc. “Les exemples de fonds spécialisés dans un seul secteur sont nombreux et anciens aux Etats-Unis, voire au Royaume-Uni“, explique Neil Harper managing director de Morgan Stanley AIP, dont le fonds de fonds (9 milliards de dollars) leur a dédié environ un tiers de ses investissements récents. En Europe continentale, le capital-investissement semble découvrir depuis peu les vertus de ces fonds mono sectoriels, comme on en trouvait déjà dans les segments du capital-risque, naturellement construit autour de spécialistes en high tech ou biotech, de l’immobilier ou des infrastructures.
Secteurs porteurs
La période actuelle, difficile pour les nouvelles levées, risquerait d’exclure les gérants trop généralistes pour générer des rendements intéressants uniquement à partir des leviers de financement (pour le LBO, leveraged buy-out) ou des évolutions des marchés. “Ce mouvement de spécialisation est durable car les fonds de non-coté généralistes tendent à trop se rapprocher des actions cotées“, poursuit Neil Harper en parlant des rendements. “Sur un marché très encombré, c’est évidemment un bon moyen de se différencier, pour des équipes de LBO ‘midmarket’ en France“, ajoute Jean-Christel Trabarel, fondateur deJasmin Capital, l’agent de placement qui a notamment participé aux levées de Céréa Mezzanine et BlackFin.
Les services financiers, complexes et soumis à de lourdes réglementations, se prêtent particulièrement à des fonds dédiés. BlackFin, créé en 2009 par des anciens de Fortuneo et d’Aviva France, a atteint 220 millions d’euros en répondant à une attente des investisseurs sur un secteur en phase de mutation. L’allemand Augur, également spécialisé dans les activités financières, a bouclé son deuxième fonds l’an dernier à 212 millions d’euros: “Le premier s’appuyait sur une vague de cessions en banque et assurance, et avait déjà rendu aux investisseurs un tiers du capital quand nous avons lancé le deuxième, indique aussi Sonia Trocmé-Le Page, associée cofondatrice de Global Private Equity, qui en a conseillé la levée. Ce segment profitera d’une activité de consolidation durable, car le secteur est suffisamment morcelé en Europe, qu’il s’agisse des assurances, banques ou sociétés de gestion“ Avec le risque d’exposer les investisseurs à un seul secteur, il est en théorie plus difficile de consacrer un fonds à une industrie trop cyclique. “Le secteur doit être assez large pour assurer une profondeur de marché et offrir suffisamment d ‘ opportunités en fonction du nombre de fonds spécialisés, afin que cette spécialisation des gérants serve à une véritable sélection“, confirme Agnès Nahum, associée d’Access Capital Partners. Ces fonds sectoriels pourraient quand même atteindre une certaine taille sans remettre en cause leur pertinence : “Dans les services financiers, Augura souvent fait appel à des co-investissements et saurait donc utiliser d’autres ressources pour construire de nouveaux groupes par croissance externe ‘build-up’ “, précise Sonia Trocmé-Le Page.
Logiques d’entrepreneurs
Les technologies, l’énergie, l’agroalimentaire et la santé sont d’autres secteurs, moins cycliques, qui ont vu éclore des initiatives (voir le graphique). Exassocié d’Apax, Laurent Ganem a par exemple collecté 209 millions d’euros pour un premier fonds dédié de la santé. Et le gérant de capital-développement Turenne Capital, qui a également développé une équipe de spécialistes, vient de lancer , avec le soutien de Malakoff Médéric, le fonds Capital Santé 1, sur les thèmes de la réduction des coûts et de l’organisation des soins. Il vise 100 millions d’euros et “devrait recevoir le soutien d’investisseurs industriels dans une logique de veille technologique“, prévoit son président François Lombard.